Francis répond - 23

Francis Lucille

Cher Francis, visionnant quelques de vos vidéos sur le net, je vous ai entendu dire que la liberté était la reconnaissance de l’indépendance de la conscience par rapport aux objets. Comprenant parfaitement que la conscience est (le) préalable de toute manifestation - car c’est en elle que les objets apparaissent et disparaissent - j’ai pourtant une grande difficulté à saisir comment il serait possible de faire l’expérience de la conscience sans objet. Jusque là, j’appréhendais la non-dualité comme étant l’union, justement, de la conscience et du monde manifesté. Je conçois donc bien que la conscience puisse exister en absence de forme, mais il me semble que pour que la conscience puisse être consciente d’elle-même, elle a besoin de pouvoir se refléter dans une forme. Pourriez-vous, s’il vous plaît, m’éclairer à ce sujet? Sincèrement vôtre, Steven

Cher Steven,

Interrogez-vous sur la nature réelle de l’expérience qui vous conduit à la certitude qu’il y a conscience. Nous croyons en général que cette certitude repose sur l’expérience objective (présence de pensées, de sensations corporelles et de perceptions sensorielles externes). Toutefois, une observation plus approfondie nous permettra de nous rendre compte que tel n’est pas le cas. En effet, l’expérience objective, l’expérience de la simple présence de pensées par exemple, ne permet pas en toute logique de conclure à l’existence de la conscience, mais uniquement à l’existence de pensées. Si nous n’avions pas une connaissance expérimentale réelle de la conscience, nous n’aurions pas cette certitude absolue que nous avons de son existence. Une telle certitude ne peut provenir que d’une expérience directe de la chose dont on est certain, et non d’une inférence qui laisse toujours une marge d’incertitude. Par exemple l’existence d’un monde extérieur en l’absence de perception est une inférence qui, bien que généralement admise par le sens commun, laisse planer un doute sur la continuité du monde. En effet, lors du rêve, nous ignorons que nous rêvons. Le monde qui semble nous entourer pourrait donc être à notre insu une illusion semblable au monde qui apparaît dans nos rêves, dénué comme lui d’existence en dehors de sa perception.

Nous devons donc conclure que la certitude de conscience provient d’une expérience non objective qui correspond à un mode de connaissance différent, d’une “aperception” subjective au lieu d’une perception objective. Dans cette aperception la conscience se connaît directement elle-même par elle-même. Cette aperception est intemporelle et supra-mentale. Vue du point de vue du mental, elle apparaît comme une compréhension sans durée, une fulgurance de l’Etre, une évidence absolue qui laisse le mental transformé sans qu’il ait accès à la connaissance de l’agent de cette transformation.

La conscience n’a pas besoin de se refléter dans la forme pour se connaître, mais la forme a besoin de se refléter dans la conscience pour être connue:

“Les êtres ont leur racine en Moi, mais Je n’ai pas mes racines en eux.” (Baghavad Gita).

La dualité forme - conscience n’est qu’une apparence analogue à la dualité reflet - miroir.

Bien cordialement,

Francis

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