Sur la peur de basculer dans le vide absolu - Francis Répond - 86

Francis Lucille

Cher Francis, Après plus de 15 ans de recherche, de tours et détours, innombrables lectures, méditations, il me semble arriver à point crucial. Cette Présence consciente est là en arrière plan, toujours plus évidente. Cette recherche qui était plus une recherche de bien-être, une manière d’éviter les soucis de la vie s’est transformée en recherche de la Vérité. Petit à petit pas mal de choses sont tombées dans ma vie. Aujourd’hui, de vieilles peurs sont réapparues et je me suis rendu compte que j’avais peur de basculer dans ce vide absolu. Il y a une résistance et je crois que fondamentalement ce (dernier?) bastion est la peur de perdre ma femme et mes enfants et ma vie de famille. J’ai l’impression qu’après avoir abandonné naturellement beaucoup de choses, ma (dernière?) identification ou image auquel je m’accroche est liée à cet amour de la famille. Cette Présence est là, parfois très forte mais il y aussi une sorte d’état dépressif dans lequel je ne peux plus m’accrocher à rien si ce n’est la famille. Il y a la peur de lâcher car tout est si radical que j’ai peur de perdre tout ce qui donne encore sens à cette vie “extérieure”. Il y a vraiment l’impression que le basculement est tout proche mais cette peur me bloque et d’un autre côté il n’y plus moyen de reculer… Que faire? Pouvez-vous m’éclairer sur ce point délicat? De tout coeur merci. Stéphane

Cher Stéphane,

Nous avons été conditionnés à attendre le bonheur des objets, non seulement des objets matériels, argent, santé, vitalité de la jeunesse, relations humaines. Tôt ou tard, nous nous rendons compte qu’aucun objet ne saurait nous apporter la quiétude et le bonheur que nous recherchons. Cette compréhension marque le début de notre démarche spirituelle et il me semble que dans votre cas cette compréhension est présente. Il ne s’agit pas ici de ne plus aimer nos proches ou de les abandonner, mais de voir clairement que même la relation la plus tendre et la plus parfaite ne saurait combler le manque qui est en nous. Lorsque nous voyons cela clairement nous sommes déjà détachés de la famille.

La peur viscérale que nous rencontrons au cours de la quête spirituelle se déguise derrière des masques divers, la peur de perdre notre famille étant l’un d’entr’eux, la peur de perdre notre propre corps étant un autre. Bien sûr, ces deux peurs sont totalement infondées, et notre raison nous assure que la poursuite de notre quête et l’abandon de notre moi conceptuel ne pourraient provoquer la disparition de notre corps physique ou de ceux qui nous entourent.

Lorsque cette peur se présente, abandonnez-vous totalement à elle, sachant qu’en fait elle ne saurait affecter votre être réel, ou votre famille. N’hésitez pas à relâcher l’effort de contrôler les choses, les sentiments et les pensées: vous ne perdrez rien, car le contrôle que vous croyez avoir n’est qu’une illusion. Tout n’est que le mouvement du cosmos.

Bien amicalement,

Francis

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